29.01.22 18:14

TURKEY VULTURE - "Twist The Knife"

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Il y a quelque chose de résolument beau et courageux dans l’idée de l'homemade. Oser le pari de tout faire soi-même, quand bien même on aurait l’une ou l’autre faiblesse, pour ensuite le diffuser aux yeux de tous… C’est tout bonnement admirable, et si tant est que la démarche soit sincère, on ne pourra qu’attribuer à ces artistes téméraires (et un peu fous) des critiques constructives, des conseils avisés et la petite lueur d’espoir qu’ils arriveront à faire de grandes choses, si tant est que cela soit là leur ambition. Fort heureusement, il ne faut pas voir dans cette courte introduction une quelconque mise en garde ou une quelconque marque de pitié. Le travail du couple derrière Turkey Vulture paraît étonnamment propre, délicieusement énergique et accompagné d’une bonne dose d’auto-dérision.

« Trop punk pour être metal et trop metal pour être punk », disent-ils de ce troisième EP. Et je dois bien l’admettre : si le monde du metal recèle encore de nombreux mystères et genres inexplorés, celui du punk, par contre, m’est plutôt connu, en tant que premier amour (et responsable de mon incursion dans le rock de manière plus générale). De fait, cela aura perverti mon jugement de manière particulièrement sévère, poussant à fustiger de nombreux « travers », convenances et autres caractéristiques somme toute subjectives de ce que le punk est ou n’est pas. Dans le cas de « Twist The Knife », cela me pousse donc à grossir le trait sur la dimension metal des morceaux, éloignée d’une conception rigoriste flirtant avec le gatekeeping… Ce qui paradoxalement est tout sauf punk.

Mais ce côté plus lourd n’a rien d’un parasite, loin de là. Totalement assumé, ce croisement des genres fonctionne plutôt bien au sein de la musique de Turkey Vulture. « Livestock On Our Way To The Slaughter », seul titre à dépasser les trois minutes, est une petite bombe qui groove, avec ses gros riffs qui font rouler des épaules dans un style à la fois old-school et totalement énervé ! Le chant clair s’acoquine d’un peu de growl, pour un effet saisissant. Les paroles donnent également l’impression d’un texte engagé, dénonciateur… Du moins jusqu’à ce que l’on apprenne qu’il s’agit d’une référence à « They Live » ! J’aime à croire que ce sentiment n’a rien d’anodin, et que ce double-niveau de lecture renforce le titre. Ce n’est pas la seule référence à la pop-culture qui se soit glissée sur l’EP : Fiji évoque quant à lui « The Truman Show », et se veut un rien moins écrasant que « Livestock… », mais plus péchu. Lui aussi n’est pas excessivement explicite dans l’hommage, et c’est un très bon point : hormis dans la parodie, les références à outrance ont tendance à m’ennuyer car souvent trop faciles, cannibalisent leur source jusqu’à en faire disparaître leur touche personnelle. Ajoutons que le pont du titre, avec ses passages distordus, est un vrai bonbon dont on regrette seulement qu’il soit si court ! C’est peut-être le plus gros point noir de l’EP : chacune des chansons, « Livestock… » mise à part, aurait gagné à avoir une demi-minute supplémentaire pour consolider leurs bases solides, et finir avec davantage d’aplomb. Cela aurait permis de pousser leurs idées plus loin encore.

« Where The Truth Dwells » surprend encore, avec une basse plus marquée et une thématique loup-garou cette fois ! Mais le vrai clou du spectacle (et le plus punky de tous !) reste le titre de clôture : « She’s Married (But Not To Me) ». C’est le titre foutraque, celui de la bonne humeur, celui qui rigole dans l’adversité. Un titre pareil annonce déjà la couleur, et le duo ne déçoit aucunement. Il donne envie de sauter, de coller des patates qui renversent la moitié de la bière de ses potes, le tout en s’amusant de cette situation pas vraiment drôle, mais dont il vaut certainement mieux en rire.

Soulignons encore une fois la production très clean de l’ensemble avant de clore cette chronique. Non, décidément, ce plaidoyer en faveur de l' homemade ne quémande pas l’indulgence auprès de ces artistes. Il invite au contraire à se pencher sur le méconnu, sur l’honnêteté, sur la simplicité. Turkey Vulture possède assurément un charme, et « Twist The Knife » est une friandise aussi brève que survoltée, que l’on ne peut qu’écouter avec le sourire. Après trois EPs, on ne peut que leur souhaiter l’impossible : un album complet !

Informations supplémentaires

  • Points: 3.5/5
  • Genre: Punk Rock
  • Pays: USA
  • Maison de disque: Autoproduction
  • Date de sortie: 14.01.22
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Ale