Chroniques

Chroniques (703)

24.04.21 08:06

SCRTCH - "Möther Sümmer"

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Un jeune duo qui va à l’essentiel, dans tous les sens du terme ! Revenant deux ans et demi après leur premier EP, avec deux petits titres (ah ce n’est pas beaucoup !) au nom de l’album (« Mother » et « Summer » donc). Ils sont surtout déterminés à nous démontrer qu’on peut faire plein de choses avec une basse et une batterie. Pour autant, on doit dire regretter un petit manque de folie et d’expérimentation, pourtant principal fer de lance du genre de la noise (alors du « noise PUNK » en plus vous imaginez). On aurait sans doute voulu que ça gueule un peu plus, que ce soit plus foutraque et vénère. On se surprendra aussi à songer à « My Sharona » des mythiques Knack lors de l’intro de « Sümmer », on penchera sur un hommage inconscient, provoqué davantage par le débit du chant qu’une quelconque volonté malicieuse. Mais si on occulte ces petites piques pas très sympas, qu’est-ce que ça vaut ? Et bien c’est pas mal du tout ! « Sümmer » conserve une belle énergie et cette rythmique pointée du doigt est efficace, elle donne justement quelque chose de plus souple et agréable par rapport au Noise plus classique (et bordélique). L’intro de « Möther » est très sympa aussi, avec cette basse simple et oppressante, traînant pendant une minute avant d’exploser. On y retrouve cette fois-ci quelques riffs un peu « Tostaky-en » mais ici relevant totalement de l’impression personnelle. On saluera surtout sur ce titre le clivage entre le côté plus posé des couplets et les cris lors des « MOTHER ! », « MOTHER ! » nous plongeant dans le désespoir le plus profond où il ne nous reste plus qu’à pleurer notre mère, figure décidément toujours faste pour nourrir l’imaginaire des créatifs. Saluons aussi son outro, tout en distorsion, et venant me clouer le bec alors que je voulais du noise. C’est moins bordélique ? Certains y verront une qualité : qu’il s’agisse d’une porte d’entrée ou simplement d’un exemple plus accessible du genre. On reste un peu sur notre faim, notamment aussi par ce goût de trop peu qui se dégagent de ces même pas dix minutes d’écoute. Mais il y a toujours un côté diablement touchant aux jeunes groupes sortis d’on ne sait où et qui sont déterminés à casser la baraque avec un genre pas forcément des plus porteurs. Avec en plus la pandémie leur tombant dans les dents à peine leur premier EP dans les bacs, cela n’a rien d’évident. Persévérez, les gars ! Hâte de découvrir un album complet de votre part.

Derrière le nom Pictures on Silence se cache un multi-instrumentiste en la personne de Fred Bressan qui nous présente son EP éponyme. Souvent, quand on parle de post-rock ambiant, on pense à un album instrumental. Cet EP n’échappe pas à la règle. Musicalement, le musicien propose un rock ambiant dans lequel les reverbs et les delays typiques du style s’en donnent à cœur joie. Parfois calme, parfois plus poussif, le mélange de rock et de synthé fonctionne bien. Le but de cet EP est de nous faire voyager au plus profond de nous-même afin de découvrir ou redécouvrir des sentiments, des émotions, ou encore des souvenirs oubliés. Fred Bressan réussit ce pari et à l’écoute des quatre titres, on se dit que la musique proposée permettra à tout un chacun de s’évader, quelle que soit l’émotion recherchée, la tristesse ou la plénitude. Avec Pictures on Silence, Fred Bressan mélange ses influences diverses et reconnaissables que sont Radiohead, This Will Destroy You ou encore Caspian et réussit à se créer une identité propre. À conseiller à tout amateur de bonne musique ambiante et à tout musicien désireux de découvrir un artiste talentueux.

24.04.21 08:02

PHOSPHEN - "Underwater"

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Quand je lis la biographie de Phosphen et que l’on évoque le style du groupe, on pense directement à un rock corsé moderne qui va pulser sévère. Mais c’est en fait tout l’inverse. Le trio pioche ses influences dans les sonorités électroniques tout droit sorties des années quatre-vingt. On a ici affaire à un électro-rock dit « rétro ». C’est donc à un groupe comme Depeche Mode que l’on pense quand on parle des effets et ambiances. Pour le côté rock, le style du groupe me fait penser à des formations comme U2 et Calogero. Le rock teinté de pop proposé par les Français est riche en émotion, empreint d’une certaine tristesse. En alternant rock burné donnant envie de bouger et pop soft au piano ou aux guitares, Phosphen arrive à nous captiver et crée une connexion avec notre cortex. Le groupe peut également diversifier son style en proposant des éléments funk (« Wonderland ») ou des influences du rock anglais (« Lying under » qui pourrait se retrouver sur un album de Keane). Le chant féminin vient se coller aux ambiances de la musique, parfois sombre comme sur le dark rock de « This might be heaven », parfois tout en douceur comme sur le superbe « Reflection ». Principalement proposé en anglais, mais également en français (« Abysses »), « Phosphen » se révèle être un album plutôt surprenant et qui pourrait plaire à un grand nombre d’auditeurs. 

24.04.21 08:00

NO TERROR IN THE BANG - "Eclosion"

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Aborder le premier album de No Terror In The Bang, c’est comme se jeter du haut d’un pont en espérant que l’élastique qui nous retient ne flanche pas. Imaginez un peu le crossover de Skunk Anansie, le côté barré de The Dillinger Escape Plan, la puissance rythmique de Periphery, la sensibilité de Deftones, le metal moderne d’In This Moment, l’atmosphère apocalyptique, mais sublime de Devin Townsend, la folie de Faith No More et le seventies jazz sombre et dramatique d’un James Bond… le tout balancé dans un shaker et proposé de manière variée au bon vouloir des musiciens, dont le cerveau n’est probablement pas humain au vu de la complexité et de la richesse des compositions que forment « Eclosion ». Ce mélange, pourtant difficile à imaginer, fait son chemin, morceau après morceau, emmené par ce qui est pour moi la meilleure frontwoman de cette dernière décennie, Sofia Bortoluzzi, qui réussit à prendre la main de son auditeur et l’emmène dans des mondes et des histoires profondément sombres. Sofia, c’est la folie de Poppy, l’explosivité de Tatiana Shmayluk (Jinjer), ainsi que la puissance de Sarah Vaughan et Ella Fitzgerald réunies dans un même corps. « Eclosion » porte on ne peut mieux son nom, tant on a l’impression qu’un monstre vient de naitre. Pour apprécier cet album, laissez vos préjugés et vos principes musicaux au placard, fermez les yeux et laissez vous emporter par No Terror In The Bang !

Bienvenue chez un dentiste fou ! La lourdeur des passages groovy, très south, vous cloue au fauteuil quand les guitares abrasives, promptes à devenir larsens ("Current Situation"), se transforment en une fraise infernale qui attaque vos dents. L’émail saute aussitôt, la douleur est intense, votre bouche se remplit de sang au milieu des crissements du métal incontrôlable. Devant vous, Mike Williams, hanté, hurle comme un possédé.

Telle est une nouvelle fois la sensation éprouvée en écoutant un album de Eyehategod. Certes, une production moins rêche, plus propre que d’habitude donne l’impression d’une légère, très légère anesthésie, mais la furie est toujours là, prête à vous déchiqueter (le très punk "The Outer Banks", l’impitoyable "High Risk Trigger"). Ce n’est pas du bref et étrange (inutile ?) interlude bluesy "Smoker’s Peace" que viendra le salut. Il est en effet suivi, pour conclure l’album, du terrible "Circle Of Nerves" et surtout du monstrueux "Every Thing, Every Day", où chaque frappe de batterie est un coup de poing dans vos rares dents qui auraient survécu au traitement de choc asséné durant 40 minutes. Un massacre… absolument jouissif, même s’il n’égale pas le parfait album de 2014, chef d’œuvre absolu.

24.04.21 07:55

CAPRA - "In transmission"

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Suite à la sortie de leur EP l’an dernier, il y avait fort à parier que Capra allait signer sur un gros label. Et c’est chose faite, le quartet de la Louisiane proposant son nouvel album « In transmission » en collaboration avec Metal Blade records ! Musicalement, le combo de Lafayette balance toujours un punk hardcore metal puissant et oppressant. La chanteuse Crow Lotus éructe toujours ses textes en sortant tout ce qu’elle a du plus profond d’elle-même. Le savant mélange proposé tend vers Walls of Jericho, All For Nothing ainsi que Trap Them ou encore Rise and Fall. Des tracks tels que « Medusa », « Paper tongues » et « Mutt » sont redoutable d’efficacité. Que dire des morceaux « Hollow doll » et « Samuraiah Carey » durant lesquels des blasts annihilateurs viennent nous aplatir totalement, nous faisant penser qu’en plus d’être oppressé, il n’y a aucune issue, et que nous allons tous y passer. « In transmission » sonne vrai et sent le vécu. Cela prend aux tripes et donne la sensation d’un sentiment d’insécurité permanent. Même si, après quelques écoutes, on peut avoir la sensation de redondance due au fait qu’il n’y ait pas de réel temps mort, au final, on s’en balance ! Car le style le veut. Et surtout parce que c’est foutrement bon !

Si certains mettent leur temps à profit lors de la pandémie pour nous sortir de nouveaux sons, d’autres ressortent les fonds de tiroir. Après le très sympathique EP « Loud and Proud » il y a une grosse année et demie, voici de retour un album de très bonne facture, gratiné de vinyles pour l’occasion. Mais surtout, et ça nous intéresse plus ici, de deux titres bonus. Le premier « Armageddon », est efficace, mais assez peu remarquable. Mais il s’insère parfaitement dans le reste de l’album, et puis surtout… Sommes-nous bien aptes à juger une quelconque convenance musicale lorsque le groupe en question était déjà là lorsque tout a été inventé et codifié ? Parler de bridges très classiques ou de paroles kitsch n’aurait que peu de pertinence ici (même si, déjà en 2007, ce heavy à l’ancienne sentait déjà un peu le réchauffé). Et puis, cela n’empêche pas certains titres tels que la plage tutélaire, « Tortured Souls » ou « Spirit of the Legend » d’avoir ce « petit goût de reviens-y » porté par des guitares qui s’emballent ou des refrains certes un brin niais, mais dont le plaisir coupable est inégalé, sauf peut-être au sein du power (qui doit beaucoup au heavy de toute façon). Et ce phénomène trouve sa synthèse, à défaut de son apogée, dans le deuxième et dernier titre bonus, sobrement baptisé « Blitzkrieg ». Tout un symbole. À défaut d’un apogée puisqu’il faut avouer que là aussi : ça manque un peu d’ambition, de créativité. Cela déçoit quelque peu, on se dit qu’un tel titre aurait mérité d’être un bouquet final cataclysmique. De fait, on croise les doigts pour que les Anglais aient encore quelques cartouches dans le ventre. Aussi appréciable soit cette ressortie, elle manque un peu de panache s’il s’agit là du couronnement de 41 années de carrière. Fort heureusement, rien ne semble indiquer qu’il ne s’agisse plus qu’une supposition !

Visions Of Dystopia est un duo multi-instrumentiste qui nous propose aujourd’hui son premier album « A nightmare on dystopian street ». Rien qu’en lisant le titre de l’album, les amateurs et connaisseurs de films d’horreur reconnaitront le clin d’œil au célèbre tueur Freddy, le titre original du film étant « A nightmare on Elm street ». De l’horreur, il en est fortement question. En effet, durant les huit morceaux que compose ce nouvel opus, les Français alternent et superposent des atmosphères sombres et glauques avec des narrations et dialogues tirés des pires films d’horreur, mais réinterprétés pour l’occasion. Les influences sont tirées de films tels que "L’exorciste", "Saw" ou encore "Chucky". Musicalement, le duo nous envoie un metal technique et progressif, proposant au final plus une bande-son de film qu’un album réel. Hormis les narrations et dialogues, cet album demeure instrumental et à l’exécution parfaite. Toutefois, malgré un tracklisting minutieusement pensé pour nous empêcher de décrocher, on peine à arriver au bout de « Suffering games », dernier titre de l’album. « A nightmare on dystopian street » est un album réussi, mais qui restera réservé à un public restreint.

 

18.04.21 09:01

OCTANE - "The life I choose"

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Octane est maintenant présent dans le paysage metal de l’hexagone depuis quelques années. Avant tout, ce groupe est une bande de potes désireux de passer un bon moment ensemble et proposer une musique à partager avec un public. Sur ce point, les Français y arrivent parfaitement. Leur nouvel opus « The life I choose » contient sept morceaux aux rythmiques assassines et groovy et aux mélodies bien pensées. On ne peut faire sans penser à Black Label Society et Black Stone Cherry dans le style proposé par Octane, le style d’écriture et les placements rythmiques y étant pour quelque chose. Des morceaux tels que « Parasite », « Another way » ou encore le plus heavy proche des années quatre-vingt « The life I choose » en sont les meilleures preuves. Mais, car oui il y a un « mais », le chant féminin vient aplatir les compositions. C’est comme s’il y avait un manque de travail sur ce point. On aurait voulu l’entendre avec des effets divers ou parfois simplement une reverb forte, et non pas brut comme sur l’album. On a parfois l’impression de se demander ce qu’il fait là. Malheureusement, cela vient ternir la musique du groupe (alors que le chant masculin est quant à lui très bon et efficace). Au final, « The life I choose » nous laisse le cul entre deux chaises. Reste la scène sur laquelle Octane dans son ensemble doit probablement mettre tout le monde d’accord.

Hate Forest a connu un début de carrière faste et plus que prolifique puisque les sorties se sont tout de même bien enchaînées entre 1999 et 2005. Mais depuis lors, c’est un peu comme si le bébé de Roman Saenko (Drudkh, ex-Dark Ages, ex-Blood Of Kingu….) avait disparu de la scène après un « Sorrow » particulièrement acclamé, voire culte. Certes, quelques splits ou compilations ont pu voir le jour par la suite, mais il était plutôt question de faire du neuf avec du vieux puisque généralement il s’agissait de titres issus des précédents albums ou démos. Revoilà donc, après quinze ans, le projet ukrainien black metal avec « Hour Of The Centaur », un album en forme d’évènement. Pour la recette, le changement n’était vraisemblablement pas à l’ordre du jour tant on retrouve la manière de faire de Saenko. C’est ainsi que les choses reprennent là où elles avaient été laissées. La recette prend puisqu’elle est maîtrisée : de la haine profonde, une boîte à rythmes offrant à la majorité des morceaux un blast ininterrompu, un son plus que crasseux, une voix d’outre-tombe et surtout une collection de riffs d’une inspiration parfois rare pour ce genre de projet. L’homme a le sens de la composition et cela se vérifie d’ailleurs au travers de « No Stronghold Can Withstand This Malice » ou encore du plus mélancolique « Anxiously They Sleep In Tumuli » dotés de parties de guitare qui sonnent parfois/souvent comme une leçon de raw black metal. Seulement voilà, même si votre serviteur respecte énormément l’intégrité artistique d’une production aussi crue, il restera toujours un peu sur sa faim en matière de son. Si celui-ci était travaillé pour lui donner sa pleine puissance tout en conservant sa saleté originelle, le message de Hate Forest serait-il différent ? La question mérite d’être posée surtout dans un cas comme celui-ci où la différence entre l’intro de l’album et le morceau qui la suit est si flagrante. En effet, dès les dernières notes de « Occidental, Beware the Steppe », on s’attend à ce que l’enchaînement vers « Those who worship the Sun bring the Night » nous prenne à la gorge alors que le soufflet retombe, ce qui ne manque pas de surprendre. Quoiqu’il en soit, le retour de Hate Forest après un long silence est désormais acté via ce « Hour Of The Centaur » ainsi qu’avec deux titres au format digital sur Bandcamp sortis le même jour.