Chacun a sa façon d’évoluer et de survivre à certaines situations. Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort et c’est de cette façon qu’a été écrit cet ep de six titres. Endure The Affliction joint sa manière de combattre ses démons et ses addictions à un rock sudiste agrémenté d’un soupçon de metalcore. Changeant littéralement de tout ce qui a été fait précédemment, le combo de Louisiane a voulu se renouveler et évoluer afin de ne pas s’enliser. L’originalité dans ce skeud est l’apparition occasionnelle de passages «osés» de Heavy Metal. J’entends par là le fait que le heavy ne colle pas forcément à tous les styles mais dans ce cas-ci, il est placé avec intelligence et passe très bien sans choquer qui que ce soit. Bref, ces six titres s’écoutent agréablement et ont le mérite de faire passer un bon moment ainsi que de vous faire découvrir un mélange musical pour le moins efficace.
Pendant un cours instant avant réception du dernier album d’E-Force, mon passé en tant que fan d’electro néerlandaise (et de hardcore/hardstyle pour être plus précis) a ressurgit : qu’est-ce qu’il venait faire chez Metal’Art celui-là ? Mais il n’en est rien, puisque l’on parle en vérité d’un groupe de thrash vieux de vingt ans et riche de son cinquième album. Groupe sur lequel je suis passé totalement à côté pendant tout ce temps (au contraire de Voivod, son grand frère, duquel Eric Forrest semble avoir bien du mal à se défaire).
Est-ce que j’éprouve quelques regrets à être passé à côté, grand fan(atique) de Thrash que je suis ? Il faut bien dire que oui, d’autant plus qu’E-force (en tout cas sur cet album, j’ai de la matière à rattraper) semble être une bestiole bien particulière dans le genre très peu mouvant du Thrash metal. Je me dois d’ailleurs de faire un second aveu : lors de ma première écoute, j’ai dû digérer l’album en trois séances distinctes, tant je me sentais submergé par ce que j’étais en train d’écouter. Est-ce que je m’encroûte ? Est-ce que je n’étais pas dans de bonnes conditions ? Est-ce que je n’étais tout simplement pas prêt ? Je laisse cela à l’appréciation de chacun ! Toujours est-il que j’ai dû reprendre mes esprits en réponse à ce que je me prenais en pleine face. La seconde écoute a pu se faire d’une traite, sachant à quoi je pouvais m’en tenir. Elle fût d’autant plus éclairante.
Avons-nous là un album démentiel, d’une originalité hors-normes et franchement violent ? N’allons peut-être pas si loin ! Mais il s’écarte tout de même du Thrash pur et dur. Bien sûr, il reste belliqueux, il reste puissant et rapide, il propose des riffs inventifs prenant leur plein essor lors de bridges aussi fréquents que délicieux. Mais il propose aussi quelques éléments bien à lui : la voix aiguë et éraillée de son frontman, qui n’est pas un cas unique, mais reste une agréable surprise, surtout sur un album ENTIER. Le tempo est aussi régulièrement plus lent, comme pour marquer une atmosphère plus lugubre et impacter davantage de ses instruments. Ce côté ambiant se décuple sur un titre comme sur « Futures Past », entièrement instrumental et tranchant encore davantage avec ce que le thrash nous livre usuellement. Enfin, certains riffs, certaines mélodies semblent plutôt sorties du monde du heavy, voire certaines expérimentations que ne renieraient pas l’indus ! Avec cette jaquette biomécanique et une totale méconnaissance du sujet, je dois dire que cela ne m’aurait guère étonné qu’ils s’insèrent encore davantage dans cette optique.
En clair, E-Force m’a procuré des sensations que je n’avais plus ressenties dans le Thrash depuis fort longtemps. Bien sûr, les bonnes surprises ne manquent pas… Surtout ces dernières années. Entre vieux pionniers toujours dans le coup et jeunes rejetons bien inspirés, il y a à boire jusqu’à plus soif pour le thrasheux invétéré. Mais est-ce vraiment novateur ? Cela devient rare. On a bien Cryptosys qui s’épanche en science-fiction plutôt que les thèmes classiques de guerre, de religion et de politique. On a bien On a bien Nightmare, groupe de power-heavy français dont le dernier album Aeternam avait quelques relents bien thrashouille (et qui surtout peut se targuer d’être l’un des, trop rares, groupes du genre à avoir une chanteuse). Mais au-delà de ça, on finit par avoir l’impression d’avoir un peu fait le tour. Donc lorsqu’un groupe comme E-Force débarque, on se tait, on prend le temps d’écouter (même en plusieurs fois !) et on savoure. Une belle découverte… et comme une envie de rattraper le temps perdu.
Suite aux nombreux remous autour du groupe concernant le départ de leur chanteur, on se demandait ce qu’allait devenir Bad Wolves, plus communément appelé par les journalistes Tommy Vext & the Bad Wolves. C’était sans compter sur la volonté des autres membres de prouver que Bad Wolves est un groupe à part entière. Après avoir recruté ni plus ni moins DL comme chanteur (guitariste de The Acacia Strain et collaborateur de groupes tels que All That Remains entre autres), les Américains reviennent avec « Dear Monsters ». Cet opus se révèle très varié et d’une efficacité redoutable, proposant un metalcore moderne groovy, lourd et mélodique, comme si Light The Torch et Meshuggah avaient fusionné. Des morceaux tels que « Sacred Kiss », « Lifeline » ou encore « Classical » en sont les meilleures preuves. Mais le groupe ne s'arrête pas là. Il peut devenir atmosphérique à la Bring Me The Horizon (« Gone »), djent à souhait (« On The Case ») ou encore rock metal survitaminé comme si Muse avait pris un boost (« Comatose »). Mes deux coups de cœur seront « Springfield Summer », single commercial donnant l’impression qu’Imagine Dragons pratiquant le metal, ainsi que « In The Middle », ballade limite hard fm tout simplement superbe. Doté d’une évolution musicale certaine et grâce à un chanteur qui n’a rien à envier à son prédécesseur, Bad Wolves balance avec « Dear Monsters » la réponse parfaite envers tous les détracteurs.
Cinq ans après la sortie de « Sovran », les suédois de Draconian libèrent leur septième album «Under a Godless Veil» en octobre dernier. Il m’a fallu un certain recul pour m’exprimer sur son contenu qui ne m’a pas laissée insensible par son atmosphère particulièrement oppressante et mélancolique. Cette dualité m’a accompagnée durant la noirceur de l’hiver et continu à m’envoûter pendant que les journées s’éclaircissent.
Incontestablement, Draconian poursuit son ascension dans une atmosphère entre un doom gothique et funéraire qui se caractérise avec un contraste percutant entre douceur et lourdeur avec une subtilité envoûtante et écrasante. «Under a Godless Veil» se démarque avec une approche poétique, romantique et mélancolique accentuée au travers d’un album concept racontant le mythe gnostique prenant toute sa dimension dans l’opposition du chant des deux protagonistes. Cette caractéristique permet de faire progresser l’histoire au travers des morceaux et des changements d’ambiances tantôt plus lourds comme sur «The Sacrificial Flame» tantôt plus mélodiques comme sur «Claw Marks on the Throne». Cette dualité est marquée entre les growls bestiaux de Andrés et la douceur aérienne de Heike. Les deux solistes permettent d’apporter une dimension et un jeu de voix comparable à la Belle et la Bête se retrouvant parfaitement sur «Moon Over Sabaoth».
Posons la remarque d’ailleurs, c’est le second album enregistré avec Heike au chant, une plus grande place lui est accordée avec des passages plus denses. La douceur angélique et cristalline de sa voix m’a fait vibrer de nombreuses émotions. Je conseille vivement de porter une attention particulière à son groupe Light Field Reverie qui a sorti son premier album «Another Wolrd» ainsi que son ancien projet ISON.
Nous retrouvons différentes atmosphères vibrantes au travers de « Under a Godless Veil » tantôt sombre tantôt mélancolique. Heike est mise en valeur avec l’interprétation céleste de « Claw Marks on the Throne » et « Burial Fields » qui amènent une sensibilité profonde et émouvante, un moment de frissons garantis. Chaque morceau apporte ses variations entre « Lustrous Hearth » qui nous transporte dans son univers planant et froid. Tandis que « Moon Over Sabaoth » et « The Sethian » nous ensorcellent par leurs noirceurs, leurs riffs écrasants et des growls imposants. Une pointe aérienne se fait ressentir sur le lancinant « Sorrow of Sophia » qui ouvre l’album et nous plonge progressivement dans son histoire ainsi que l’envoûtant « Sleepwalkers ». Continuons avec « The Sacrificial Flame » ou encore « Ascend Into Darkness » refermant l’album en beauté se rapprochant d’un univers Funeral Doom toujours aussi écrasant dans cette dualité entre l’ombre et la lumière.
Difficile de poser les mots justes pour conclure un album qui m’a autant épaulée et tourmentée d’émotions. Si « Under a Godless Veil » paraît difficile d’approche à la première écoute, il est pourtant plutôt aisé de tomber sous son charme brusquement. Draconian s’impose davantage dans son genre de doom gothique dans lequel s’associe une excellée de créativité par le côté poétique qui donne vie à cette œuvre si prenante et si singulière. « Under a Godless Veil » réussit à nous envoûter dans une atmosphère sombre dans laquelle la douceur lumière parvient à s’immiscer et s’associer dans une musique tumultueuse grâce à ses dualités. Si j’ose dire que cet album frôle la perfection, presque un an après sa sortie, il est encore difficile de s’en défaire.
À la lecture du titre de l’album et du genre dans lequel officient les norvégiens, je ne m’attendais pas réellement à quelque chose d’aussi varié… Et fracassant ! Le quatuor sort en effet, de leurs modestes mots, un « petit » album…c’est-à-dire pas un EP et pas un vrai album non plus, un objet dans l’entre-deux ! Et il faut dire qu’avec un peu moins de trente minutes de musique, nous avons en effet quelque chose de plutôt riche. On commence avec « The Seed », qui fait à lui seul près d’un tiers de l’album et se veut planant, posé, atmosphérique. La plage tutélaire vient lui ajouter du macabre, du dramatique tout en restant lancinant. « The Dwell » rajoute une batterie explosive et des riffs plus rapides, donnant très énergique. « Awakening Remains… » devient alors l’apogée, le point culminant où tous les instruments s’emballent dans un brouhaha grandiose. Seul le dernier titre, « The Sleep » déçoit un peu par sa fin très abrupte, n’apportant pas de réelle conclusion au microcosme de l’album. Il apporte néanmoins une accalmie bienvenue, sorte d’instant d’introspection suite à l’histoire qui vient de nous être contée. Mais si sa fin déçoit, le groupe semble déjà plancher sur un autre mini-album… Nul doute qu’il fait office de teaser en ce sens, de première partie. Nous avons hâte d’en découvrir la suite !
Comment mieux résumer le nouvel ep de Vilegloom qu'en mentionnant le groupe lui-même : "Les pensées et les tentatives suicidaires sont quelque chose que beaucoup de gens ont et/ou souffrent encore. Et comme beaucoup d'entre nous dans le groupe l'ont vécu, ces choses affectent soit notre vie personnelle ou celle de ceux qui nous entourent de manière importante. Tout le monde traite ses démons différemment, et pour nous, cet Ep a fonctionné comme un énorme exutoire pour laisser sortir beaucoup de ces pensées et sentiments, et leur a donné un endroit où résider en dehors de notre propre esprit. Bien que le contenu de ces chansons soit sombre, nous souhaitons qu'elles soient une libération ou un exutoire pour toute personne ayant des problèmes suicidaires, et qu'elles montrent que vous n'êtes pas seul dans la façon dont vous pensez ou ressentez, et qu'il est possible de manifester ces pensées et actions en dehors de leur réalisation". Entre la fin électro de "Old Soul" et "Living Hell" ou la chute de tempo dans "Dead Weight", mon cœur chavire. La voix colossale de leur chanteur ne fait que rajouter de l'ombre à leurs compositions deathcore déjà très pesantes. Si vous êtes fan de Traitors, Bodysnatcher ou BlackTongue, cet Ep est pour vous !
Leur amour mutuel pour une période musicale qui remonte maintenant à un demi-siècle est évident dès le moment où le morceau d’ouverture « Don't Talk About Love » et son riff de guitare à la Thin Lizzy arrive. Fervents amateurs du rock classique des années septante, The Hornets pompe tout ce qu'il y a à prendre dans les légendes de cette époque allant des Stray Cats comme sur « Superman (Nietzsche) », en passant par Status Quo (« Get out… (Baby Get out)) » ou même Lynyrd Skynyrd, Kiss, Chuck Berry voire les Rolling Stones pour ce qui est des autres morceaux. Manquant cruellement de titres marquant les esprits et qui resteraient surtout en tête, l'album est divertissant sans pour autant faire preuve d'originalité. Tenant plus d'une compile des seventies que d'un album personnel à proprement parler, « Heavier than a Stone » ne pèse pas très lourd dans la muzicosphère actuelle. Oserais-je dire que The Hornets manque de "piquant" et de personnalité pour percer… ?
Spiral Grave est l’héritier d’Iron Man, orphelin du guitariste-fondateur et compositeur Alfred Morriss III, décédé en 2018. Sa maladie était la cause du silence du groupe depuis la sortie de l’excellent "South Of The Earth" en 2013. "Legacy Of The Anointed", avec Will Rivera (Lord) en nouveau membre, s’inscrit dans la lignée de cette œuvre majeure du doom, comme en atteste la présence d’un "Nightmare On May Eve : Dunwich Pt 1", flashback du "Half-Face/Thy Brother’s Keeper (Dunwich Pt. 2)" présent sur "SOTE". Les vocaux, que l’on peut trouver agaçants, de Dee Calhoun, les riffs aisément mémorisables, le groove général - mention à la basse - et le son typé années 70’s rappellent les heures anciennes. Toutefois, les survivants n’hésitent pas à accélérer le tempo, à proposer des titres rapides ("Your Ennemy’s Ennemy", "Tanglefoot"), aux sonorités heavy. L’album regorge d’agressivité, de colère ("Nothing") et plonge parfois dans une atmosphère poisseuse, sudiste, comme sur "Abgrund", huit minutes de doom malsain qui explose en une furie foudroyante pour conclure en beauté ce "Legacy Of The Anointed" de haute tenue.
Pas de changement en vue pour Space Chaser, troisième album en neuf ans d'existence et les teutons restent dans leur moule. Chant toujours ressemblant tant dans l'intonation que dans le rythme à celui d’un Bruce Dickinson des premiers jours. Pratiquant un thrash metal propre et bien structuré, le style du groupe manquera cependant de riffs originaux et aura tendance à se perdre dans la masse de groupes sortant du déjà vu et revu. "Give Us Life" ne manque cependant pas de panache. Restant plaisant et donnant la pêche même aux plus vieux d'entre nous, les puristes pourront profiter de Space Chaser et les adeptes du changement passeront leur tour. Les plus pointilleux d'entre vous pourront même pousser le vice en remplaçant les paroles du titre "Give Us Life" par celles de "Postmortem" de Slayer et constater à quel point il est difficile de renier ses origines.
Le maître-mot pour ce nouvel opus de Silence Equals Death sera : Cardio ! En effet, dès que vous aurez entamé la première piste de cet album, vous aurez compris le sens du mot. Que cela soit lors des circle-pits ou même en essayant de suivre le rythme dans vos séances de vélo elliptique voire de tapis à la salle de sport, je ne pourrais que vous dire: « Bonne Chance et sort ton troisième poumon car ça va suer grave ». Les vétérans du hardcore du New-Jersey Silence Equals Death, sont de retour avec leur nouvelle sortie « I'll See You On The Other Side » qui renferme six nouveaux morceaux combinés à une version remixée et remasterisée de leur sortie 2020 « Revolution Rising ». Je peux déjà dire que ceux qui auront écouté « Signals » ou « Killing Floor » disponibles sur les plateformes de streaming, ne regretteront en rien l’achat de ce dernier. Influencés par des monstres comme Most Precious Blood, Strife ou Terror, Silence Equals Death est là pour vous refaire le râtelier et, s’ils sont sympas, ils vous laisseront deux dents pour coincer la paille qui vous servira à manger. Stay brutal, Stay Hardcore ! C’est du tout bon !
Après les retours plus que positifs de leurs deux premiers albums, Scarved se devait de confirmer avec leur nouvelle offrande « Flashback ». Mélangeant subtilement rock, hard rock et metal, les Belges affinent leur style et, emmenés de main de fer par leur chanteuse Caro Verboven, nous proposent un album très varié, mais homogène. Du rock mélodique de « Flash » au heavy metal survolté de « Head over heels », du hard rock eighties qui fait danser façon Guns n’roses de « Flashback » ou « Poison kiss » au rock groovy psychédélique des seventies de « Schizophrenia » et « Catch me offline ». Ou encore du slow/ballade hard fm « Lost in space » digne du « You and I » de Scorpions, au Rock thrashy façon Metallica de « Lockdown » … tous ces éléments sont ici pensés et imbriqués ensemble pour proposer pas moins de dix hits qui feront fureur dans votre platine, mais également en concert. Mon coup de cœur ira pour le morceau « Rising soul » et son rock progressif ultra seventies rappelant Black Sabbath et autre Blue Öyster Cult grâce aux claviers. Bref, si vous cherchez un très bon album de Hard rock/metal moderne mais qui peut vous faire voyager dans le temps, foncez sur « Flashback ». C’est du tout bon et c’est du belge !
Il faut le dire, « The last of us » m’avait mis sur le cul. Republic Of Rock’n Roll m'avait complètement surpris avec son pur mélange de Foo Fighters et Queens Of The Stone Age. C’est dire si j’attendais « Baudelaire le revenant » avec impatience. Une chose est certaine : les Français gardent les mêmes bases qui les ont fait connaître, c’est-à-dire un power rock parfois furieux et survolté, parfois plus perfide et tiré des années septante. Mais l’on peut retrouver d’autres influences venues s'ajouter au style efficace du groupe. On pense souvent à Guns N’Roses (« La fontaine de sang », « Sed non satiata », au rock parfois psyché et bluesy de Black Stone Cherry et Blue Öyster Cult (« Je suis comme le roi »), au hard rock d’un certain AC/DC, ou encore à certaines références de l’Hexagone telles que Saez et Noir Désir (« Chant d’automne », « À celle qui est trop gaie »). Dans l’ensemble, les morceaux sont plus directs et toujours aussi percutants. La qualité est au rendez-vous. Toutefois, un effort sur le mix du chant aurait encore pu élever l’album. Chanté en Français (cela mérite d’être salué) et exécuté d’une main de maître, Republic of Rock’n Roll délivré avec « Baudelaire le revenant » un album puissant, barré, diversifié, qui vient confirmer tout le bien que l’on pensait d’eux.
Vétérans du milieu viking, Obscurity en est à son neuvième album (excusez du peu). Ayant remanié quelque peu le groupe, nos cinq allemands accueillent deux nouveaux membres dans leur tribu en la personne de Askar à la guitare et Isarn à la batterie. Pas de changement musical probant dans ce nouvel opus, que les fans de la première heure se rassurent (pas de lapinou rose ou de licorne à l’horizon). Rythmes accrocheurs, noirceur latente dépeignant bien l’air vicié des champs de bataille, énergie débordante, … Tous ces éléments font partie intégrante de cet album. Ils vous en feront voir de toutes les couleurs en passant du festif « Konstantinopel » au riffs rapides et acérés de « Blot ». Jamais vous n’aurez le temps de vous reposer d’autant que le chant allemand n’aide pas à adoucir les compositions. Le seul changement que vous pourriez ressentir sera dans la piste finale (bonus track, cela dit en passant) « Valkyria » qui est dans un autre style (j’ai eu du mal à l'intégrer dans une catégorie bien définie d’ailleurs) voire un autre univers dénotant avec le reste de l’album. Obscurity est généreux car vous en aurez pour cinquante-six minutes dans les oreilles, ce qui devient rare pour un album qui se révèle d’un excellent cru.
Si le titre de leur premier album n’est pas suffisamment équivoque, nul doute que leur premier titre, simplement baptisé « Intro », va vous mettre au parfum : ça gueule « ACAB » d’emblée, et pendant près d’une minute ! C’est qu’on n’a pas manqué de malheureux exemples de violence policière américaine ces dernières années, et pour des chiliens fraîchement expatriés, on ne peut qu’imaginer que la vie new-yorkaise n’a pas dû diminuer ces mauvaises impressions, que du contraire. Sans surprise, lorgner du côté du hardcore pour exprimer injustices et colères n’est pas fortuit.
Si le premier « vrai » morceau se place comme une présentation de ce juvénile quatuor (là aussi, « We Are Non Residents » laissant peu de place au doute, même pour quelqu’un qui parle anglais comme une vache espagnole), très vite, on se rend compte du poids qui pèse sur nos comparses : « Resilience », « Comfortably Tied », « Not For Me » sont autant d’appels à l’aide que de brûlots nécessaires. Et si le clin d’œil au titre controversé de Childish Gambino « This Is America » est possiblement une affabulation personnelle, l’occasion serait que trop belle que pour croire qu’il ne s’agisse que d’une coïncidence.
Et musicalement alors ? Et bah ça envoie pas mal, comme il est attendu sitôt que l’on joue avec ses tripes et avec toute l’honnêteté du monde. Rapide et puissant, leur musique ne se prend pas les pieds dans le tapis comme certaines formations qui, certes, ont beaucoup sur le cœur, mais une formation musicale peut-être encore trop faiblarde. Ici, c’est carré et endiablé, tout en n’oubliant pas d’être appréciable en tant qu’objet auditif, en tant que chanson que l’on veut gueuler autant que l’on veut voir nous titiller les tympans. On veut cogner autant que l’on veut taper du pied, et cerise sur le gâteau : on se tape en plus une idée plus géniale qui consiste à rajouter des rythmiques traditionnelles Mapuche (peuple autochtone du Chili et d’Argentine) à l’ensemble. Si aux oreilles du non-initié (dont je fais partie), cela ressemble à de la flûte, cela ne doit pas vous faire fuir pour autant, que du contraire : cela n’a rien d’un gadget ou d’une simple volonté de se démarquer. C’est une part que l’on imagine importante de leur identité, personnelle comme musicale, et on ne peut que leur implorer de garder cette idée sur de futures productions. « Brutal Caeca » et « Preludio » en sont ainsi garnis, et ça fait prendre de la grandeur à ces morceaux. Peut-être aurait-on aimé voir cela également au début de l’album, mais la sensation de surprise et de fraîcheur en aurait sûrement pâti. On se retrouve néanmoins avec des rythmiques entêtantes et quelques bridges bien thrashouilles qui font plaisir.
Je peux le dire sans trop sourciller : ce projet me touche énormément. Et c’est d’autant plus admirable que la forme est au moins aussi bonne que le fond. On aurait apprécié une poignée de chansons supplémentaires, mais pour un premier album, concocté en pleine pandémie en plus alors qu’ils espéraient tourner un peu avant… C’est de l’excellent travail. Hâte d’en entendre plus de la part de cette nouvelle référence de colère débridée, parce qu’assurément : le climat très tendu aux States aura au moins permis une résurgence punk de premier ordre, et de haute qualité.